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Adieu taxe de bienvenue

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  • 2017-03-28
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La taxe de bienvenue porte très mal son nom. Y a-t-il une plus détestable manière d’accueillir les nouveaux propriétaires que de leur expédier une charmante facture de plusieurs milliers de dollars ?

Quarante ans après son apparition au Québec, il serait grand temps de remanier ou, mieux encore, d’abolir purement et simplement cette taxe qui freine la mobilité et décourage l’achat d’une maison.

Il n’y a pas à dire, les droits de mutation tombent comme une tonne de briques dans le portefeuille des nouveaux propriétaires qui ont déjà encaissé les frais d’inspection, la facture du notaire, la note des déménageurs, les dépenses d’aménagement et j’en passe.

Quelques mois après le déménagement, la taxe de bienvenue atterrit dans la boîte aux lettres. C’est le clou dans le cercueil.

Si vous achetez un condo d’une valeur moyenne de 300 000 $ à Montréal, la note s’élèvera à 3000 $.

Une maison unifamiliale classique de 500 000 $ ? La taxe sera de 6000 $.

Et la facture s’envolera à 10 000 $ pour une résidence plus chic de 700 000 $… et à plus de 20 000 $ pour une demeure de 1,2 million de dollars dans un quartier cossu de Montréal.

Bienvenue chez vous !

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La semaine dernière, la Fédération des chambres immobilières du Québec (FCIQ) réclamait une fois de plus un allégement de la taxe de bienvenue, recommandation qui a été chaudement applaudie par l’Association des professionnels de la construction et de l’habitation du Québec (APCHQ).

À juste titre, la FCIQ souligne que la grille de calcul de la taxe n’a pas été revue depuis 1992.

Comme le prix des maisons a pratiquement triplé depuis 25 ans, la taxe coûte beaucoup plus cher qu’avant.

Par exemple, un ménage qui achetait une maison de 100 000 $ en 1992 devait payer 750 $ en droits de mutation. Aujourd’hui, cette même maison vaut 290 000 $. La famille qui voudrait l’acheter devrait allonger 2850 $ de taxe de bienvenue. C’est presque quatre fois plus !

Faute d’indexation, la structure de la taxe de bienvenue a provoqué une hausse d’impôt déguisée.

Ainsi, la taxe de bienvenue a été une véritable manne pour les villes. À Montréal, par exemple, les droits de mutation ont rapporté 163 millions l’an dernier, soit deux fois plus qu’en 2002.

Ces droits, qui représentaient 2,4 % des revenus totaux de la Ville en 2002, rapportent aujourd’hui presque 4 % des revenus.

Pour ramener la taxe sur terre, la FCIQ réclame donc un remaniement de la grille de calcul. Selon sa proposition, le premier taux de 0,5 % s’appliquerait jusqu’à 100 000 $ (au lieu de 50 000 $ présentement), le deuxième taux de 1,0 % jusqu’à 500 000 $ (au lieu de 250 000 $), seuil à partir duquel le troisième taux de 1,5 % s’appliquerait.

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De plus, la FCIQ propose d’exonérer les premiers acheteurs de la taxe de bienvenue.

Ce serait une bonne idée, car il est devenu particulièrement difficile pour les jeunes d’entrer sur le marché immobilier. Avec l’envolée des prix des 15 dernières années, ils doivent payer le gros prix pour une maison.

Ce n’est pas la taxe de bienvenue qui les encouragera à accéder à la propriété. Déjà que le Québec est la seule province qui compte moins de 70 % de ménages propriétaires, avec un taux de seulement 61 %, se désole l’APCHQ.

Les villes font des pieds et des mains pour faciliter l’accès à la propriété aux jeunes ménages : aide financière, coup de pouce à la rénovation, transport en commun gratuit, etc.

Il me semble qu’on pourrait commencer par enlever les embûches qui se dressent sur leur chemin, à commencer par la taxe de bienvenue.

D’ailleurs, certaines villes comme Montréal et Laval offrent des programmes de remboursement de la taxe de bienvenue, même si Québec force toutes les municipalités à la percevoir, au taux prescrit.

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Mais pourquoi ne pas aller plus loin ? Pourquoi ne pas abolir la taxe de bienvenue ?

Cette taxe est nocive, car elle freine la mobilité sur le marché immobilier.

Prenez un employé qui doit déménager pour son travail, une famille qui voudrait une plus grande maison après la naissance d’un enfant ou encore un couple qui souhaite réduire ses dépenses après le départ des enfants. La taxe de bienvenue leur mettra des bâtons dans les roues.

En fait, la taxe de bienvenue réduit le nombre de transactions immobilières et diminue les prix d’achat, a démontré une étude menée par Ben Dachis, de l’Institut C.D. Howe, après l’introduction de droits de mutation supplémentaires à Toronto.

Même pour les villes, la taxe de bienvenue est loin d’être parfaite. Elle est beaucoup plus volatile que l’impôt foncier «?normal?», ce qui constitue un inconvénient pour le financement des municipalités, a déjà souligné une étude de Frank A. Clayton, de l’université Ryerson.

Les deux chercheurs en viennent à la conclusion qu’il serait souhaitable d’éliminer la taxe de bienvenue, quitte à la remplacer par une hausse équivalente de l’impôt foncier qui comporte moins d’effets négatifs.

Tant qu’à y être, les municipalités devraient développer un mécanisme permettant aux propriétaires de payer leur taxe en petites bouchées. Pour les contribuables, un paiement hebdomadaire ou mensuel serait beaucoup plus facile à digérer qu’une facture de plusieurs milliers de dollars à payer d’un coup sec.

Source: http://affaires.lapresse.ca/opinions/chroniques/stephanie-grammond/201609/30/01-5026224-adieu-taxe-de-bienvenue.php

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